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Que sont devenus les Français d'Afrique du Nord ?
Les Juifs d'Afrique du Nord
Les Juifs du M'zab 
 
 
 
 

 45 ANS APRES LEUR EXODE, QUE SONT DEVENUS LES FRANCAIS D'AFRIQUE DU NORD ?
 
 
Se sont-ils intégrés ?
Le dynamisme, le goût du travail, la joie de vivre, ces qualités qu'on leur reconnaît habituellement, leur ont-elles permis de tisser une nouvelle toile, de reconstituer leur patrimoine perdu, de refaire leur trou ?
Leur regard décalé sur une Métropole qu'ils n'ont en général découvert que tardivement, leur esprit défricheur peu enclin à se laisser impressionner par l'adversité, leur capacité d'adaptation héritée d'une tradition d'émigrés enrichie par une éducation multiculturelle, ont-ils contribué au développement de la France métropolitaine, leur nouveau pays ?
Ou au contraire, les conditions assez fâcheuses de leur accueil, les stéréotypes défavorables, voire franchement hostiles, déversés sur eux ont-ils rendu épineuse leur intégration dans cette vieille nation chargée d'histoire et nourrie de clichés?
 
Apporter une réponse de portée générale supposerait d'analyser la reconversion de chacune des personnes dispersées sur l'ensemble du territoire hexagonal et figurant au fichier détenu par la Délégation aux Rapatriés, lequel comporte environ trois millions de cartes jamais informatisées et rarement tenues à jour.

En revanche, certains Français d'Afrique du Nord ont entamé ou poursuivi, en France ou ailleurs, des carrières remarquables et rendu des services éminents. Leur notoriété permet de les repérer. Certes, une telle approche privilégie les titres, les fonctions, la renommée. Elle ne prétend donc pas fournir un échantillon représentatif de la population rapatriée. Mais elle offre d'intéressants sujets de réflexion.

Il importe de ne pas oublier pour autant la laborieuse et méritoire réinsertion des membres des classes moyennes, des obscurs, des sans-grade : artisans, ouvriers, pêcheurs, petits entrepreneurs, techniciens, enseignants, modestes commerçants, agents des services publics, cultivateurs, etc. Utilisant certains ouvrages déjà publiés sur ce sujet et un certain nombre d'annuaires, aidé de nombreux amis, formant l'espoir que d'autres, aux moyens plus puissants, pourront ultérieurement étendre le cadre de cette recherche et lui donner la dimension socio-ethnographique qu'elle mérite, j'ai pu réunir un millier de notices biographiques.
 
Sans trop s'embarrasser d'ordre protocolaire, on peut y distinguer :

Une centaine de personnalités scientifiques et universitaires, parmi lesquelles :
Alain Bensoussan, membre correspondant de l'Académie des sciences, président du Centre national d'études spatiales (CNES) et de l'Agence spatiale européenne, Jacques Berque, islamologue, professeur au Collège de France, Gabriel Camps, préhistorien, membre correspondant de l'Académie des inscriptions et belles lettres, Jean-Claude Casanova, économiste, membre de l'Académie des sciences morales et politiques, Claude Cohen-Tannoudji, prix Nobel de physique 1997, membre de l'Académie des sciences, professeur au Collège de France, Michel Combarnous, polytechnicien, thermodynamicien, membre correspondant de l'Académie des sciences, Jean Coulomb, directeur de l'Institut de physique du globe, Jacques Frémeaux, historien, professeur à la Sorbonne, ancien président de l'Institut d'histoire des pays d'Outremer, Claude Hagège, linguiste, professeur au Collège de France, Jacques Derrida, philosophe, Serge Haroche, physicien, membre de l'Académie des sciences, Jacques Joussot-Dubien, photochimiste, membre correspondant de l'Académie des sciences, Gaston Julia, major de l'X et de Normale-Sup, mathématicien, membre de l'Institut, professeur au Collège de France, Jean-Louis Miège, historien, membre de l'Académie des sciences d'Outremer, Georges Souville, archéologue, membre de l'Académie des sciences d'Outremer, etc...
 
Une centaine de professeurs de médecine partis sur les traces des deux prix Nobel que comptait déjà l'Afrique du Nord : Alphonse Laveran (Constantine) et Charles Nicolle (Tunis), parmi lesquels :
José Aboulker, neurochirurgien, héros de la Résistance; Paul Aboulker, urologue qui opéra François Mitterrand, Pierre Aboulker urologue qui opéra Charles De Gaulle, Edmond Benhamou, hématologiste, membre de l'Académie des sciences, Henri Bismuth, membre de l'Académie de chirurgie, Pierre Goinard, membre de 1'Académie de chirurgie, Claude Griscelli, directeur général de l'inserm, Félix Lagrot, membre de !'Académie nationale de médecine et de l'Académie de chirurgie, Robert Slama, président de la Société française de cardiologie, Maurice Lubiana, radiologiste cancérologue, et Président du Conseil scientifique de recherche sur le cancer, etc...
 
De grands juristes ou hauts magistrats, tels que :
René-Jean Dupuy, professeur au Collège de France, Michel Ameller et Jacques Robert, tous deux membres du Conseil constitutionnel, Alexandre Benmakhiouf, procureur général près la Cour d'appel de Paris, Jean-Paul Costa, président de la Cour européenne des droits de l'homme, Pierre Drai, premier président de la Cour de cassation, Jean Géronimi, avocat général à la Cour de cassation et dix-sept conseillers d'Etat : Claude Lasry, secrétaire général du Conseil d'État, Jacques Attali, Maryse Aulagnon, Maurice Benassayag, Louise Cadoux, Jean-Paul Costa déjà cité, Paule Dayan, Raphaël Hadas-Lebel, Jean-Claude Hassan, Augustin Ibazizen, Jean-Claude Pins, Jacques Ribs, Philippe Sauzav, Pierre Zémor.
 
De nombreux hommes politiques dont vingt et un ministres :
Michèle Barzach, André Cellard, Georges Chavanes, Joseph Franceschi, Elisabeth Guigou, Michel Jobert, René Lenoir, Hamlaoui Makachera, Christian Nucci, Pierre Pasquini, Edgar Pisani, Paul Quilès, Roger Romani, Michel Roussin, Alain Savary, Henri Torre, Philippe Séguin et pour mémoire car ils ont été ministres avant 1962, Jacques Augarde, Jacques Chevallier, Henri Fouques-Duparc, le docteur Sid Cara et sa fille Néfissa.
Une quarantaine de parlementaires, élus sur le territoire métropolitain depuis 1962, sans compter les députés et sénateurs d'Algérie, élus du temps où celle-ci était française.

Des personnalités religieuses :
Un archevêque (Mgr Collini), quatre grands rabbins (David Askenazy, Jacques Ouaknin, René-Samuel Sirat, Joseph Sitruk), deux évêques (Philippe Barbarin, Jean Scotto).
 
De grands soldats :
Un maréchal de France: Alphonse Juin, vainqueur de la campagne d'Italie (1943-1944) qui offrit à la France la seule victoire de portée stratégique remportée par ses armées durant la Seconde Guerre mondiale. Il fut aussi le chef d'état-major général des armées françaises lors de la Libération (1944-1945). Pour mémoire, un autre maréchal de France fut aussi Pied-Noir : Louis Franchet d'Esperey, commandant les armées d'Orient. Seize généraux, treize amiraux, un commissaire général de la marine, auxquels il convient d'ajouter un général canadien et un officier supérieur de la marine américaine.
 
Des diplomates :
Vingt et un ambassadeurs, dont quatre ont été élevés à la dignité d'Ambassadeur de France: Alain Grenier, Charles Malo, Gilbert Pérol et Jacques Tiné
 
Des hauts fonctionnaires.
Une vingtaine de préfets : Georges Bastelica, Alain Beikiri, Mohand Benzaouer, Roger Benmebarek, Mansour Benozen, Jean-Paul Bolufer, Pierre-André Costa, Jean-Pierre Delpont, Jacques Franquet, Alain Gerolami, Mahdi Hacène, Bernard Hagelsteen, Marcel Julia, Lucien Kalfon, Kamel Khrissate, Philippe de Mazières, Pierre Moatti, Marcel Morin, Jacques Périllat, Jean Sicurani, René Stambouli, Jean Vassalo et autant d'ingénieurs généraux, inspecteurs généraux de l'Equipement, de l'Industrie ou de l'Education nationale, directeurs d'administrations centrales etc...
 
Une cohorte d'artistes, musiciens, compositeurs, peintres, sculpteurs, créateurs de mode tels
Armand Assus, Louis Azzaro, Jean-Charles de Castelbajac, Yves Saint-Laurent, philosophes, écrivains, journalistes, chansonniers, humoristes, vedettes du show-biz, artistes de cirque (Annie Fratellini, Achille Zavatta) et de music-hall,
 
des sportifs détenteurs de records, champions du monde ou médaillés olympiques.

Dans l'ordre de la Légion d'honneur trois grand-croix , onze grands officiers, quarante-neuf commandeurs, un nombre incalculable d'officiers et de chevaliers.

Dans l'ordre national du Mérite, on trouve notamment trois grands-croix : Redjem Benzaïd, Jean Coulomb et Suzanne Lefort née Rouquette, quatre grands officiers : Louise Cadoux, Pierre Giraudet et René Lenoir, Philippe Rouvillois, trente-six commandeurs, un grand nombre de chevaliers dont Edgard Attias, etc...

De nombreuses croix de guerre 1945.

La réussite sociale et les mérites reconnus des Français d'Afrique du Nord n'ont donc pas à rougir d'être confrontés à ceux de leurs compatriotes métropolitains. Cette réussite ne doit rien à des privilèges économiques. Au moment de l'exode, la plupart ont vu leur patrimoine et leur outil de travail, fonds de commerce, ferme, atelier, maison, mobilier, voiture, s'évanouir en fumée. Ils ont dû repartir de zéro et ce ne sont certes pas les indemnisations (quand elles ont pu être perçues) qui y ont remédié.
 
Leur ascension sociale ne fut pas non plus reçue en héritage. Non, les Français d'Afrique du Nord n'étaient pas riches ! Pour reprendre l'image dont usait, par dérision, Albert Camus, leurs parents n'étaient pas des colons à cigare et à cravache montés sur Cadillac.
Camus lui-même était orphelin de guerre. Sa mère, femme de ménage. Le père du maréchal Juin était gendarme. Celui du prix Nobel, Claude Cohen-Tannoudji, était employé de bureau. Emmanuel Roblès était né d'un père maçon et d'une mère blanchisseuse. Jacques Attali ne manque jamais de rappeler que ses parents étaient de simples commerçants algérois, etc... Ils n'étaient pas non plus des Petits Blancs incultes dont l'ignorance aurait fait des contremaîtres arrogants et racistes.
Ils ont abondamment alimenté les grandes écoles et l'Université, pénétré le Collège de France et l'Institut.
On chercherait en vain un extrémiste parmi les hommes ou femmes politiques issus de leurs rangs. On peut, au reste, être surpris que, souvent vilipendés collectivement en tant qu'abominables colonialistes, ils aient su se faire apprécier individuellement au point d'être si souvent élus en politique, portés à la tête d'organisations professionnelles, ou acclamés comme vedettes de spectacle...
 
Il y a quarante cinq ans, la roue implacable de l'Histoire a voulu le broyer. Le rétablissement qu'il a opéré de ce côté-ci de la Méditerranée est à coup sûr le meilleur gage de l'authenticité des valeurs dont il était porteur. Les descendants de Pieds-Noirs, peuvent sereinement assumer leurs racines !

2007 - René Mayer, ancien directeur de l'Habitat au Gouvernement général de l'Algérie, et l'auteur de Algérie : Mémoire déracinée, Editions l'Harmattan, prix Jean Pomier décerné par le Cercle algérianiste en 2000.

Que ceux qui, malgré leurs mérites et leur notoriété, ne sont pas cités, ou ont pu être oubliés, veuillent bien m'excuser.

 
 
 
 
 

LES JUIFS D'AFRIQUE DU NORD EN ALGERIE

Eliaou Gaston GUEDJ

 
La décolonisation de l'Afrique du Nord entretient aujourd'hui l'illusion d'une réalité d'authentiques nations nord-africaines. En vérité les nations de la région ne sont que des fictions politiques récentes. Elles ignorent les réalités humaines historiques qui ont, tout au long des siècles, donné une homogénéité à cette région. Les juifs d'Afique du Nord ont été des acteurs constants et actifs de la réalité historique de ces territoires. C'est ainsi que l'histoire des juifs de Berbérie se confond à bien des égards avec l'histoire de l'Afrique du Nord. Nous trouvons encore en Afrique du Nord et au Sahara des traces de civilisations préhistoriques. Les sépultures de cette époque sont attribuées par les Berbères à des peuples plus anciens qu'eux-mêmes et que les Berbères appellent les Beni Sfao et les Djaoulla, ce qui tend à confirmer que les Berbères ne sont pas des autochtones en Afrique du Nord.
 
Les origines du judaïsme en Afrique du Nord remontent au plus lointain passé connu de la région. La civilisation la plus ancienne qui ait marqué ces contrées fut la civilisation phénicienne. En ces temps, il semble acquis que des colonies juives, issues des tribus d'Israël étaient fortement implantées en Afrique du Nord. Les pères de l'église romaine d'Afrique nous en apportent la confirmation en constatant la persistance de l'usage de l'hébreu, cinq siècles après la chute de Carthage, à Djerba et en Numidie, alors qu'en 586 avant J.C., date de la destruction du premier temple par Nabuchodonosor, l'hébreu a été supplanté par l'araméen à Jérusalem.
La judaïsation des populations d'Afrique du Nord aux époques phénicienne, carthaginoise, romaine fut si conséquente que la plupart des royaumes berbères qui se sont constitués à l'époque de Carthage étaient judaïsés. L'historien arabo-berbère Ibn Khaldoun, dans son histoire sur les Berbères note qu'à l'arrivée des Arabes une grande partie des habitants professait le judaïsme et que l'usage de l'hébreu était courant. Il relate l'existence de tribus juives pratiquant encore le judaïsme à l'arrivée des Arabes
- les Djerraoua dans l'Aurès ; la Kahena était une Djerraoua.
- les Nefoussa et les Medioni en Algérie.
- les Melloula et les Baranès au Maroc.
Ibn Khaldoun signale en outre que le seul royaume berbère ayant survécu dans le Touat à l'Islam était juif (il n'a disparu qu'au XVIe siècle sous la domination ottomane).
L'occupation romaine de l'Afrique du Nord commence en 146 avant J.C. Pour romaniser la région, Rome va d'abord tenter d'annihiler les forces sociales existantes. Les Juifs de Berbérie vont être la seule force structurée capable de résister. Paradoxalement la colonisation romaine va se traduire pour les Juifs de Berbérie par un regain de vie, par un épanouissement de conscience rarement égalé. Parallèlement la colonisation romaine d'Israël et la destruction du deuxième temple ont eu un profond retentissement en Afrique. Les populations juives déportées ou volontairement émigrées fuient vers l'Afrique du Nord. Elles amènent avec elles une haine sourde contre Rome. Flavius Josephe nous rapporte qu'à la suite de la chute de Jérusalem, " les zélotes dirigés par un certain Yohanan fomentent en Cyrénaïque un puissant mouvement séditieux contre Rome ". Les Juifs animés d'un souffle impétueux, national, messianique pour tout dire, devaient tenir Rome en échec pendant plus de trois années. De nombreux vestiges épigraphiques découverts en Afrique du Nord confirment les renseignements sur la richesse de la vie juive dans la région à cette époque. D'après ces documents, chaque communauté était animée par une assemblée culturelle à laquelle participaient les juifs de naissance, les prosélytes et les judaïsants. Et les populations dites berbères rejoignent la synagogue sans qu'aucun pouvoir temporel ne les y contraigne.
L'empereur Constantin, empereur de la Rome chrétienne, tente de faire basculer cet ordre social en pratiquant sans résultat un prosélytisme actif à l'encontre des juifs de Berbérie. Le concile de Nicée en 325 fait le premier pas dans l'établissement du Christianisme comme doctrine d'état. Les Juifs de Berbérie sont peu à peu exclus de la cité et les empereurs édictent progressivement des lois spécifiques afin d'éliminer une structure judaïque gênante pour le concept romain
- interdiction de tester ou de recueillir des héritages,
- suppression de l'autonomie judiciaire des communautés, etc.
- conversions forcées, etc.
Malgré tout, les juifs de Berbérie restent fidèles à leur foi et de violentes révoltes éclatent en Kabylie, dans l'Aurès et dans l'Ouarsenis.
L'empire romain se disloque. Byzance devenue Constantinople tente de recueillir ses dépouilles. En Afrique du Nord l'administration romaine a disparu, c'est l'anarchie. En 429, Boniface voulant supplanter Rome fait appel à Genséric, roi des Vandales. Celui-ci conquiert Carthage en 439, s'installe en Ifrikya et abandonne le reste de l'Afrique à son propre sort. Les Juifs de Berbérie retrouvent leur liberté et leur autonomie. Pour combattre les Vandales, les Romains vont doter deux tribus juives (les Botr et les Baranès) d'un nouveau moyen de déplacement : le dromadaire. Lorsque l'empereur Justinien envoie Belisaire pour chasser les Vandales on retrouve à ses côtés ces deux tribus et leurs chefs de guerre dont le plus célèbre, Gabaoun, se fait remarquer à la bataille de Tracaméron en 535 qui scelle le sort des Vandales.
Justinien rétablit la puissance de l'Eglise et proclame la ségrégation religieuse avec des lois impitoyables contre les juifs. La lecture formelle du Pentateuque fut imposée au peuple juif. Les juifs chassés d'Europe par les Wisigoths entre 613 et 622 viennent grossir les communautés juives d'Afrique en révolte contre Byzance. En Afrique du Nord les conversions forcées et les discriminations ont créé un climat insurrectionnel.
Lorsque la France débarque à Alger en 1830 la région aura traversé deux autres étapes historiques :
1. la période d'islamisation du VIIIe au XVe siècle.
2. la domination ottomane du XVe siècle à 1830.
Byzance a engendré en Afrique du Nord l'unanimité contre son empire et sa religion, le Christianisme.
L'Afrique est prête à s'allier avec le diable pour chasser Byzance. Après la mort d'Omar en 644, Sidi Okba tente l'aventure nord-africaine. La confusion qui régnait et qui règne encore sur l'illusion d'une tolérance coranique va accentuer l'anarchie des consciences. Ernest Renan a écrit : " Les libéraux qui défendent l'Islam ne le connaissent pas. C'est l'union indiscernable du spirituel et du temporel, c'est le règne du dogme, c'est la haine la plus lourde que l'humanité ait jamais portée... "
L'Occident feint d'ignorer la législation sur le statut du non-musulman dans la cité islamique. Le pacte d'Omar, véritable code tiré de la sourate IX, établit qu'en terre d'Islam, le non-musulman n'a qu'une seule alternative : se convertir ou mourir. Seule exception, les gens du Livre qui sont soumis au statut de " hal el dimma " qui fait du non-musulman un " dimmi "
Une telle alternative entraîne forcément des conversions en masse. Seuls les Juifs de Berbérie s'opposent par les armes à ces nouvelles conversions. Dans la tribu des Djerraoua, la Kahena réussit à rallier tous les opposants à l'Islam. Elle en devient le porte-drapeau. La tribu juive des Baranès, fortement structurée, constituera le noyau de cette opposition ; les rejoignent tous ceux qui refusent l'Islam. Cette alliance remporte une éclatante victoire à Téhouda près de Biskra en 687 au cours de laquelle Sidi Okba périra. Son tombeau se trouve toujours à l'emplacement de la bataille ; malheureusement quelques années après, les Baranès sont battus près de Kairouan. Les alliés non juifs de la Kahena l'abandonnent. Elle est capturée et égorgée par Hassan, successeur de Sidi Okba en 698. Désarmés, les survivants n'ont plus d'autre choix que se convertir, mourir ou fuir vers des lieux inaccessibles.
Après une épuration ethnique sans précédent opérée par Idriss en 789 et la destruction en Mauritanie Tingitane des forteresses de Beni Ouata, Mediona, Belloula et des citadelles de Fes et Riatta, le Christianisme en Afrique du Nord s'efface. Les juifs de Berbérie rejoignent les communautés de l'intérieur et du Sahara, inaccessibles aux tyrans. Les récits des événements de cette période relèvent alors plus de la légende que d'une réalité authentique. Y-a-t-il eu une souveraineté arabe ? Aucune trace d'administration ou de culture arabe dans la région.
Une modification de la législation de " al el dimma " va permettre aux Berbères islamisés de s'armer et de prendre le pouvoir. Ils créent le royaume de Tahret à la fin du VIIIe siècle, chassent les Arabes d'Afrique, les poursuivent dans les déserts de Tripolitaine, s'emparent de l'Egypte, renversent le kalifat établi à Damas et créent la dynastie des Fatimides. C'est ici que prend naissance le Kharedjisme.
L'Algérie a connu en tout et pour tout deux autres royaumes islamiques : le royaume hammadite et celui de Tlemcen. Tous les autres pouvoirs islamiques qui se sont manifestés à cette époque n'ont été qu'éphémères, parcellaires et toujours exercés par des berbères islamisés. L'administration islamique étant inexistante, les juifs de Berbérie retrouvent, avec la liberté, les conditions d'un regain de conscience. En s'installant à Kairouan avec Sidi Okba en 687, les Juifs de Berbérie ouvrent des écoles talmudiques dont la renommée atteint les rives d'Israël et de l'Europe. L'oeuvre aussi bien scientifique, talmudique, philosophique ou littéraire au cours de cette période sera immense dans les écoles de Gabès, Tunis ou Djerba.
Au XVe siècle deux événements vont marquer le judaïsme nord-africain
- l'expulsion des Juifs de la péninsule ibérique,
- l'installation des Turcs en Afrique du Nord.
La situation de faiblesse dans laquelle se trouve le nord de l'Afrique en fait une proie facile. Après avoir occupé la Grèce et les Balkans les Ottomans dominent l'Afrique du Nord en prenant aux Espagnols Mers El-Kebir en 1505, Oran en 1509, Bougie en 1510.
Le 30 juillet 1492, l'élimination des Juifs de la péninsule ibérique est totale ; un grand nombre d'entre eux émigrent en Afrique du Nord. Ce sont les Sépharads (Espagnols). Les rapports de ces nouveaux arrivants avec les Juifs de Berbérie seront très distendus. Les deux communautés vont évoluer parallèlement. Les Sépharads développent une culture judaïque spécifique qui se consolide et finit par constituer l'essentiel de la culture dite sépharad. Au XVIe siècle ce Sépharadisme va s'enrichir d'un contingent de juifs de Toscane. A cette époque, Livourne est le coeur du Judaïsme européen. C'est à Livourne que la version du Talmud ayant cours actuellement a été éditée au XVe siècle. Sépharads et Toscans créent une véritable aristocratie financière et culturelle qui va établir des liens étroits avec Safed, capitale en ces temps de la conscience juive. C'est à Safed qu'apparaissent les oeuvres majeures de la Kabale.
Dans l'intérêt de l'administration ottomane cette aristocratie financière va jouir de privilèges lui permettant de poursuivre ses pratiques commerciales et financières qui constitueront l'essentiel de la vie économique de la région. Les juifs de Berbérie continuent eux, à être soumis à la stricte loi islamique de " hal et dimma "
Paradoxalement les juifs de Berbérie, à l'intérieur des terres inaccessibles à l'administration ottomane, resteront à l'abri de la vindicte turque. Les Sépharads au contraire, vivant dans les grandes villes subiront épisodiquement des pogroms dont les plus meurtriers furent ceux de Fès, Marrakech, Sefrou, Djerba et en Libye au XIXe siècle.
La France occupe Alger le 5 juillet 1830. Le premier gouverneur, le maréchal Clauzel, décide d'abolir les lois ségrégatives en vigueur. Il établit le statut des juifs. Le 16 novembre 1830, Jacob Bacri est nommé chef de la nation juive. Le premier conseil municipal d'Alger constitué le 29 janvier 1831 comprend 7 musulmans et 2 juifs.
Après que le nouveau chef de la " nation juive ", Aaron Moatti, ait suggéré le désir d'intégration des juifs à la nation française, on supprime en 1836 la magistrature juive. L'idée de naturalisation de tous les indigènes, Musulmans et Juifs, est émise pour la première fois en commission en 1843. L'ordonnance du 19 mai 1848 accorde aussi bien aux Musulmans qu'aux juifs un droit de vote censitaire sous certaines conditions d'âge et de résidence. Ces électeurs peuvent être élus aux conseils municipaux.
Les décisions législatives des trente années qui ont suivi la prise d'Alger ont placé le Juif dans un état hybride de statut juridique. Il se trouve ainsi confronté à des situations inextricables dans les domaines de l'état-civil ou des contentieux commerciaux.
Le sénatus-consulte du 14 juillet 1865 ouvre la porte de la nationalité française aussi bien aux Musulmans qu'aux Juifs. Il précise :
- 1) les indigènes musulmans ou juifs sont français.
- 2) ils peuvent acquérir la nationalité sur simple demande ; il y eut alors 1039 naturalisations dont 289 pour les Juifs.
La débâcle et la capitulation de l'empereur à Sedan vont créer dans la communauté musulmane un certain trouble. Un climat d'insurrection est signalé par le gouverneur, le baron Durrieu ; dès le 9 août 1870 la situation devient critique. Le 15 septembre le baron Durrieu rapporte : " Le mouvement insurrectionnel va devenir général ; cela me paraît imminent ".
Le 14 octobre 1870, Crémieux, ministre de la Justice, établit en neuf décrets le nouveau statut de l'Algérie. Le décret le plus important est celui qui fixe le régime civil et naturalise en bloc les Juifs d'Algérie. Les territoires du Sud n'ayant pas été pacifiés, les Juifs de ces régions ne bénéficieront pas du décret. Le Juif d'Algérie sera soumis dès lors à la loi française. Immédiatement les hauts fonctionnaires et le nouveau gouverneur, l'amiral Gueydon, seront hostiles à la réforme. La tentation est alors grande de trouver une raison à l'état d'insurrection qui perdure ; le décret Crémieux jouera le rôle de bouc émissaire. Afin d'entretenir cette illusion une frange de la population française va se joindre à l'agitation dans un mouvement anti juif qui ne cessera qu'après la destitution du maire d'Alger, Max Régis, en 1898.
Le XXe siècle ouvre au juif d'Algérie un demi-siècle de paix sociale. L'apaisement revenu, l'administration coloniale va redonner à l'Algérie une prospérité qu'elle semblait avoir oubliée depuis l'époque romaine. Les trois ethnies constitutives de sa population paraissent avoir trouvé leur unité dans le creuset national fait d'un sentiment patriotique si spécifique à la population algérienne d'alors, prompte à proclamer son attachement à la France et à sa terre natale, l'Algérie.
Pour le Juif d'Algérie cette période sera marquée par deux événements
1) en Occident le régime d'Hitler ouvre la porte à l'antisémitisme et au drame de la "shoa"
2) en Orient le muphti de Jérusalem prêche dès 1926 la djihad contre les juifs. Il s'en suit une série de pogroms qui débute en Israël par la destruction totale de la communauté juive d'Hébron en 1929 et se termine en 1946 (Tripoli). Ceux qui ont vécu celui du Constantinois en 1934, savent bien avant 1954 ce que pouvait être l'horreur des massacres en terre d'Islam.
Les Alliés débarquent à Alger le 8 novembre 1942. Au cours des deux années précédentes la communauté juive d'Algérie fut soumise aux lois d'exception en vigueur, mais tous comptes faits, au regard de ce qui se passait ailleurs, la communauté juive d'Algérie traverse cette période sans trop d'aléas. Cette période vit la constitution d'un groupe de résistance exclusivement juif, le groupe Léo Gras. On peut porter à son actif d'avoir, au moment du débarquement le 8 novembre, neutralisé les centres vitaux de la ville d'Alger, ainsi que les délégations d'armistice allemande et italienne.
Comme tous les Français d'Algérie, les juifs ont participé dans les troupes françaises aux campagnes d'Italie, de France et d'Allemagne. Le 8 mai 1945 tout semble rentrer dans l'ordre ; le Juif d'Algérie a cru un moment pouvoir reprendre la vie là où il l'avait laissée. Mais le monde avait changé et l'exode des Juifs d'Algérie commence.
Lorsque les événements de novembre 1954 éclatent, le juif d'Algérie est un Français comme les autres ; il s'engage à suivre le même destin que celui que l'on réserve aux Français d'Algérie. Lorsque le F.L.N. intervient auprès des autorités juives d'Algérie pour leur demander de s'engager à ses côtés, elles expriment leur position dans "Information juive" dans un texte dans lequel on peut lire :
"La collectivité juive d'Algérie vivrait sous le régime du mépris si elle acceptait de renier une citoyenneté pour laquelle elle a toujours combattu... Nous sommes Français et nous voulons le rester, notre sort est lié à celui de la population française d'Algérie."
Fidèle à ses amis d'abord, à elle-même ensuite, la communauté juive d'Algérie a quitté, dans sa totalité, cette Algérie qui avait été sienne pendant plus de deux millénaires.
Eliaou Gaston GUEDJ
 
Revue l'Algérianiste n° 64, décembre 1993
 
 
 
 
 

LES JUIFS DU M'ZAB (à Ghardaïa)
 

Tout visiteur de la vieille cité de Ghardaïa, même non averti, ne manquait pas de remarquer un quartier qui, bien que présentant les mêmes caractères de structures et d'architecture que le reste de la ville, était tout de même très différent. C'était le quartier israélite, considéré comme le plus archaïque des mellahs d'Algérie.
Situé à l'est de la mosquée ibadhite, il se trouvait, avant l'annexion de 1882, complètement isolé de la ville par un mur continu. Ce véritable ghetto dont il était interdit de transgresser les limites, n'était accessible que par deux portes. L'une d'elles, située rue Badjri, était tellement basse et étroite qu'on ne pouvait la franchir autrement qu'à pied. L'autre, placée du côté opposé, dans le prolongement de la même rue, existait encore en 1922. C'était le Kherjet El Ihoud, la Sortie des juifs.

Dès 1882, tout comme la cité mozabite elle-même, ce ghetto a éclaté vers le sud et les nouveaux quartiers à vocation commerciale. Les juifs, libérés des interdictions de vivre en dehors de leur mellah et de pratiquer le commerce, y installèrent leurs activités avec néanmoins le souci de rester groupés et rattachés à leur quartier où ils conservaient en général leur domicile. Par ailleurs, l'enceinte continue qui séparait les quartiers mozabites et le quartier israélite a peu à peu disparu. Seules des rangées de pierres symboliques marquaient les limites et l'emplacement des portes.

Le quartier était d'une malpropreté inconcevable, se distinguant des autres parties de la ville qui étonnaient par leur éclatante propreté. En effet, chez les Ibadhites, les maisons même les plus modestes étaient entretenues avec un soin vigilant et périodiquement blanchies à la chaux, la voirie était régulièrement débarrassée de ses ordures et décombres. Chez les Juifs, par contre, où les habitations étaient pourtant du même type avec patio intérieur et galerie à l'étage, les façades étaient souvent décrépites.
Mais autant les demeures ibadhites étaient fermées et mystérieuses, autant chez les Juifs, étaient-elles ouvertes au passant. Ni méfiance, ni secret. Quel contraste avec le silence, les visages fermés opposés par les Musulmans, avec leur refus d'entrer en société !... De libres visages féminins : nous voilà bien loin de l'islam ! Ces femmes, cette vie populeuse, entre voisins, dans la rue, ces odeurs, ces lessives en famille, tout cela rappelle certains bas-quartiers de Naples".

Les ruelles étaient aussi étroites et tortueuses qu'en ville mozabite, mais il y régnait une animation particulière. Des gosses vêtus à l'européenne, sales, hirsutes, souvent coiffés d'un béret, couraient dans tous les sens. Des causeurs, adossés aux murs discutaient.

Les hommes étaient dans l'ensemble habillés d'un large séroual noir et gris et d'une veste à l'européenne par-dessus laquelle ils enfilaient, surtout le jour du sabbat, une gandoura en toile blanche. Ils portaient, pour la plupart, une chéchia molle, ronde, en feutre rouge, sinon un béret ou une calotte en tissu brodé ou en laine. Par temps froid, ils s'enveloppaient d'un burnous blanc dont la "guelmouna " (capuche) couvrait la coiffure. Beaucoup de jeunes avaient adopté le costume européen et, le samedi, se répandaient dans le quartier administratif et européen des groupes de garçons endimanchés et de filles en toilette recherchée, fort avenantes.

Statut social et juridique avant l'annexion de 1882
Dans les pays musulmans, les Gens du Livre "Ahl-El-Kitab" sont "les protégés de l'islam". "Les Juifs comme les Chrétiens bénéficient du statut de "dhimmis", c'est-à-dire qu'ils restent soumis à une sorte de contrat indéfiniment reconduit par lequel la communauté musulmane accorde hospitalité et protection aux membres des autres religions révélées, à condition toutefois que les Juifs respectent la domination de l'Islam...".

Albert Memmi, analyse fort bien le caractère humiliant et menacé de cette existence : "La cohabitation avec les Arabes n'était pas seulement malaisée, mais menaçante. Les communautés juives vivaient dans les ténèbres de l'histoire, dans la menace, l'arbitraire et la peur. Les Juifs étaient livrés à l'homme de la rue. Mon grand-père portait encore les signes vestimentaires distinctifs. Jamais les Juifs n'ont vécu en pays arabe autrement que comme des gens diminués et exposés". Ceci permet de comprendre le caractère craintif et l'humilité de cette population, repliée sur elle-même, obligée de survivre dans une constante discrimination, ne trouvant sa force que dans sa cohésion et dans sa foi. Les juifs, ainsi maintenus en marge de la société musulmane, étaient méprisés par leurs maîtres mozabites et vivaient dans un état d'infériorité qui leur donnait un complexe. Ils subissaient humiliations et brimades et avaient fini par s'y habituer.

Ils jouissaient des mêmes droits personnels et sociaux que les Musulmans mais n'avaient pas les mêmes droits politiques.
Nous examinerons ces "droits" en partant des interdictions et obligations multiples et sévères qui leurs étaient imposées :
- obligation de vivre dans un quartier isolé, à l'écart des populations musulmanes. Ghardaïa avait son mellah délimité par un mur continu qui n'avait que deux ouvertures dont la dernière subsistait encore en... 1922. Il était interdit de construire en dehors de ces limites.
- interdiction d'avoir un lieu de culte trop apparent, tout en leur reconnaissant par ailleurs une liberté complète pour la pratique de leur culte. Le mellah n'avait donc qu'une synagogue très simple, ne se distinguant pas d'une maison ordinaire.

- obligation, pour les hommes, de porter des vêtements noirs et un turban noir, de se laisser pousser les cheveux sur les tempes, les cadenettes ou "Soualefs", longues mèches prenant naissance devant les oreilles.
- interdiction pour les femmes de s'expatrier. Il convenait en effet de ne pas faire bénéficier les Israélites d'un statut plus libéral que celui appliqué aux Ibadhites eux-mêmes.
- interdiction de se rendre acquéreurs de terres cultivables.
- interdiction de se livrer au commerce. Les juifs devaient donc se limiter aux petits métiers et à l'artisanat. Leurs boutiques étaient localisées aux environs immédiats de la ville mozabite où ils sont en partie restés. Rappelons-nous que c'est pour exercer ces métiers que les premiers Juifs avaient été amenés à Ghardaïa. C'est pour les y contraindre que les deux dernières interdictions ont été édictées.
- obligation de payer un impôt de capitation qui leur garantissait la protection des Mozabites. En contrepartie ils n'étaient pas obligés de participer à la défense de la ville. Il était d'ailleurs inconcevable qu'ils puissent, mêlés aux Mozabites, participer à l'originale garde de nuit, institution très réglementée. Les gardiens de nuit, de fondation très ancienne, les "Idouaren" (ceux qui font la ronde), étaient chargés de veiller sur la cité endormie et d'assurer la tranquillité et la sécurité des habitants, Juifs compris.
- obligation pour la collectivité juive de verser une redevance annuelle à la Djemaa, assemblée des notables, de Ghardaïa, ceci en remplacement de la corvée générale dont ils étaient exemptés. Le mépris pour les juifs était, en effet, tel qu'il était inconcevable de les voir mêlés aux Mozabites dans les chantiers collectifs (réparation de l'enceinte, corvées générales de bois, d'aménagement de chemins, barrages....) ou dans des patrouilles de surveillance ou de défense de la ville. Ils étaient exemptés, non par égard, mais par mépris.
- interdiction d'utiliser les puits des Musulmans et obligation de n'utiliser que deux puits spéciaux creusés par eux et réservés à eux. Ainsi, même encore en 1960 ! La communauté ayant acheté un troisième puits vit son accès direct interdit par la Djemaa.
- obligation d'avoir un cimetière éloigné de la ville et à l'écart des cimetières ibadhites.
- obligation d'avoir un abattoir séparé.
- obligation de fournir des sacs de noyaux de dattes pour permettre de colmater les brèches en cas de défection du barrage de Salem ou Aïssa.
- obligation de payer des amendes fixées par la Djemaa en cas d'infraction à ces multiples interdits.

La situation des juifs du Mzab n'était donc, avant l'annexion de 1882, guère enviable. Reconnaissons cependant que, grâce sans doute à leur docilité et leur soumission, ils ne furent guère victimes de violences collectives analogues à celles que connaissaient périodiquement les mellahs du Maghreb (quartiers mis à sac, synagogues incendiées).
Rien de comparable non plus avec les juifs d'Algérie au début du XIXe siècle qui étaient dans une situation très pénible. Ils subissaient des brimades de toutes sortes et ils ne pouvaient opposer aucune résistance quand ils étaient maltraités par un Musulman, quelle que soit la nature de la violence.
La protection des Ibadhites était donc réelle. Il est vrai que la communauté juive était trop misérable pour devenir une cible pour les pillards.
Charles Kleinknecht

Algerianiste n°83 septembre 1998

 
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